Mes coups de cœur 2017

Ça y est, une nouvelle année se termine ! L’occasion pour moi de faire le point. En 2017, j’ai lu 43 romans. Neuf ont particulièrement retenu mon attention. Ils ont ralenti le temps, ont donné de la perspective aux heures et de la couleur aux minutes. Voici mes coups de cœur 2017 : trois Français, une Anglaise, un Canadien, un Italien, une Hongroise, un Espagnol et un Américain.

Quand sort la recluse, Fred Vargas, 2017

Dernier tome paru des aventures du commissaire Adamsberg, Quand sort la recluse est aussi l’un de mes favoris. Il entraîne le lecteur dans une affaire d’araignées et de terreurs du passé. Après neuf tomes, les personnages sont devenus des amis fidèles. Adamsberg berce et réconforte, au centre d’un polar sordide et terrifiant.  « Ils le jugeaient souvent rêveur et lunaire obstiné, en bien ou en mal, et attribuaient à cette anomalie l’improbable succès de ce jour. Sans comprendre qu’il voyait dans les brumes, tout simplement. »

La Langue des oiseaux, Claudie Hunzinger, 2014

Une romancière cinquantenaire décide de tout quitter du jour au lendemain, et part vivre dans les montagnes des Vosges. Son seul contact avec le monde extérieur, un ordinateur qu’elle utilise pour acheter des vêtements sur Ebay. Là, elle rencontre une mystérieuse Japonaise dont les annonces la fascinent. Se noue alors une amitié lunaire. La Langue des oiseaux prône le retour aux choses simples, et magnifie les femmes et leurs combats, différents et pourtant si similaires.

Neige, Maxence Fermine, 1999

« Et ils s’aimèrent l’un et l’autre
Suspendus à un fil
De neige. »
Entre poésie et roman, Neige est un livre très court, que j’ai parcouru en moins d’une heure. Au XIXè siècle, Yuko souhaite devenir maître dans l’art du haïku. Lentement, il rédige des centaines de poèmes blancs et cotonneux. Il finit par entreprendre un voyage périlleux, à la rencontre de celui qui pourra l’aider à ajouter de la couleur à son art. Neige est un livre simple, fable initiatique douce où les mots sont rythmés par de silencieuses avalanches.

La Servante écarlate, Margaret Atwood, 1985

La Servante écarlate présente une société pas si irréaliste, dans laquelle la chute de la fertilité a transformé les femmes en esclaves sexuelles, rattachées à des maîtres, dans l’attente d’une grossesse miraculeuse. Defred tente de se souvenir de son passé, un passé où les catastrophes écologiques, guerres et actes de terrorisme ont poussé le peuple à perdre sa liberté au profit d’une sécurité toute relative. La Servante écarlate permet de se rappeler que rien n’est jamais acquis : les droits des femmes peuvent être perdus du jour au lendemain.

Le Patient anglais, Michael Ondaatje, 1992

J’avais vu le film, jolie pépite d’Anthony Minghella, et me suis enfin décidée à ouvrir le roman après l’avoir déniché dans une bourse aux livres. La Seconde guerre mondiale s’achève, mais Hana, infirmière militaire, reste au chevet d’un aviateur anglais grièvement brûlé. S’ajoute au duo un démineur sikh et un personnage mystérieux des renseignements militaires. « La villa rappelle un de ces tableaux : tous quatre saisis dans un élan intime, momentanément éclairés, se détachant ironiquement sur le paysage de cette guerre. » L’écriture de Michael Ondaatje est presque orientale, remplie d’histoires voilées à peine chuchotées.

Soie, Alessandro Baricco, 1996

Hervé Joncour veut sauver son village, dont les élevages de vers à soie se meurent. Il prend la route en direction du Japon, afin d’en ramener des œufs sains. Dans ce court roman se mêlent histoires d’amour avortées, mariages au long cours et choc des cultures. Soie est un roman mystique, dans lequel on ne cherche pas à suivre une histoire haletante mais plutôt à se laisser porter par les phrases aux mots souples et émouvants. Il m’a confortée dans mon amour naissant pour Alessandro Baricco, un  auteur multiforme à la plume sans pareille.

La Porte, Magda Szabo, 2003

Durant près de vingt ans, la narratrice entretient une relation ambigüe avec Emerence, sa domestique. Personnage rigide engoncé dans ses principes, Emerence tente de dicter la vie de ses proches. Par amour, elle est capable d’enfermer, de détruire, de faire souffrir. Mais derrière ce masque se dévoile une grande solitude, cachée au fond d’un tiroir, derrière la porte de sa maison que personne n’a le droit de franchir. La Porte est un ouvrage étouffant où le lecteur est noyé dans les orgueils des personnages. Emerence fascine par son ambivalence, sa toute-puissance et sa générosité à double tranchant.

La Caverne des idées, José-Carlos Somoza, 2000

Attention, livre compliqué ! La Caverne des idées est un roman à double voire à triple entrée. L’histoire se déroule dans la Grèce antique, où un éphèbe est retrouvé mort. Héraclès Pontor, (ancêtre symbolique d’Hercule Poirot, mêmes initiales, mêmes procédés, même corpulence), enquête. Mais cette histoire n’est en réalité qu’un roman en cours de traduction. Entre les lignes, le traducteur souhaite dénicher l’eidesis, figure de style inventée par José-Carlos Somoza, qui pourrait faire de la fiction la grande gagnante du duel avec la philosophie. La Caverne des idées nous embrouille dans un roman explosif.

La Femme qui avait perdu son âme, Bob Shacochis, 2015

Une femme est retrouvée morte au beau milieu d’un Haïti à feu et à sang. Qui était Jackie Scott, ou encore Renee Gardner, Dottie Chambers, Dorothy Kovacevic ? Tom Harrington tente de démêler le vrai du faux et se retrouve au beau milieu d’histoires plus grandes que lui : FBI, CIA, forces spéciales… Des histoires que la fille de diplomate connaissait bien, bercée dans un monde où une poignée d’hommes peuvent changer la donne. La Femme qui avait perdu son âme est mon dernier coup de cœur 2017, et c’est un chef-d’œuvre. « Tout de suite, elle reprit ses esprits et ses doigts cherchèrent le mi bémol majeur, tandis que des carillons de haine résonnaient dans l’aria de sa soumission. »

Laisser un commentaire